Bactérie pour excès de poids


Cette statuette, appelée Vénus de Willendorf, date du paléolithique supérieur soit plus de 20 000 ans avant notre ère. Elle représente une femme, debout dans le plus simple appareil, présentant une forte obésité.

Il devait se trouver des êtres humains en surpoids, il y a donc très longtemps, alors qu’à cette époque il n’y avait pas de MacDonald, ni de supermarchés remplis d’aliments hypercaloriques ou encore des pâtisseries proposant d’appétissants gâteaux à la crème. En fait, en ces temps reculés, l’agriculture était à son balbutiement et la vie était plutôt rude. Il s’est pourtant trouvé des individus en excès de poids, et ce, en se nourrissant pour l’essentiel de ce que leur offrait la nature, en fonction des saisons. Alors, comment expliquer cela ?

 

Des pathologies résultant d’anomalies métaboliques liées à des carences de toutes sortes ne devaient pas être chose rare à cette époque. L’environnement devait également jouer un rôle. Les virus ainsi que les microbes sont apparus sur Terre bien avant l’homme ! Parmi ces micro-organismes, la famille Chlamydia occupait le « terrain » comme c’est encore le cas maintenant. Et pourquoi ces bactéries en particulier ? Parce que l’un des éléments de cette famille, appelé Chlamydia pneumoniae, peut être la cause d'un excès de poids.

 

Ses spécificités : il contamine très facilement l’homme aussi bien du paléolithique que du 21ième siècle. En fait, Chlamydia pneumoniae peut se transmettre par la toux, mais aussi par la salive. En outre, cette bactérie peut survivre dans le milieu extérieur pendant 15 à 30 heures, ce qui lui laisse largement le temps d’infecter un grand nombre d’individus !

Actuellement le niveau de contamination de la population dans les pays développés se situe entre 40 et 55 %. Il est de plus de 60 % dans les pays en voie de développement. Il faut savoir que 90 % des personnes infectés n'ont présenté aucun symptôme après contamination. Dès qu’il a pénétré l’organisme, cet agent pathogène s’ingénie à trouver un endroit confortable, de préférence à l’abri du système immunitaire. Quand il a atteint son objectif, il peut alors mener une vie tranquille pendant de longues années. Toutefois, il arrive qu'en début de contamination Chlamydia pneumoniae se dévoile au travers des infections respiratoires parfois récidivantes.

Autre caractéristique ce germe, pour survivre dans notre l’organisme, a besoin d’une cellule hôte. Il a en effet la particularité d’être incapable de fabriquer lui-même certains éléments indispensables à son développement, comme l’ATP, qu’il doit impérativement trouver dans son environnement. Pour cette raison il est considéré comme une entité se situant à mi-chemin entre le virus et la bactérie, une sorte de microbe primitif. S’il trouve les conditions idéales à son épanouissement, il devient alors, au sein de l’organisme, un pathogène persistant. Dans cette situation, on peut observer malgré tout quelques anomalies biochimiques, notamment la présence dans le sang de substances présentant un caractère inflammatoire. Ce qui est surprenant mais finalement normal est que ces substances sont émises spécifiquement par les cellules qui abritent cette bactérie.

 

 

Chlamydia pneumoniae et prise de poids

 

Les chercheurs sont à présent convaincus que cette bactérie est impliquée dans un certain nombre de pathologies où existent des anomalies liées à la gestion des lipides. De récents travaux de recherche ont montré qu’elle a quelque chose à voir avec le pourcentage de graisses observé dans l’organisme des individus en excès de poids:


September 2011, 35, 1225-1232.

Chlamydophila pneumoniae antibodies may be independently associated with increases BMI* and percentage of body fat among women.

 

*BMI = body mass index est l’équivalent anglais de l’indice de masse corporelle qui sert à définir le type d’obésité.

 

Il a pu être établi un lien de cause à effet entre la bactérie et l’indice de masse corporelle. En fait, le microbe qui nous intéresse, après avoir investi l’organisme d’un individu, prédispose ce dernier à la prise de poids et à diverses autres pathologies plus ou moins en relation avec des anomalies métaboliques. Cela signifie que quel que soit le régime adopté, du régime paléolithique au régime hyperprotéiné, dès cessation du régime, la reprise de poids sera inévitable chez tous les sujets infectés par cette bactérie et dans un état actif. Toutefois, si Chlamydia décide de migrer dans une autre partie du corps, en particulier le cerveau, il se peut alors qu’il n’y ait pas de reprise de poids. Il peut également ne pas y avoir reprise de poids parce que le germe se sera tout simplement mis en dormance (état inactif) en attendant peut-être des jours meilleurs.


Dernier point : la probabilité de présence de Chlamydia pneumoniae chez un groupe de femmes de 20 à 80 ans en surcharge pondérale a fait l’objet d’une étude. Des analyses sanguines ont mis en évidence des anticorps anti Chlamydia pneumoniae dans le sang d’un grand nombre de participantes à cette étude, plus précisément chez 77 % d’entre elles !


Remarque : chez une certaine fraction de l’ensemble des individus en excès de poids, c’est adénovirus-36 (lire article : Obésité, virus et effet yoyo) qui en est la cause. Cependant, il y a tout lieu de croire qu’il doit exister des cas où l’excès de poids résulte de la présence dans l’organisme de Chlamydia pneumoniae et du virus. Dans cette situation perdre du poids est toujours possible mais ne pas en reprendre devient pratiquement mission impossible à moins de se faire « violence » aussi bien sur un plan alimentaire que sur le plan de l’hygiène de vie.

 

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Références bibliographiques

 

 

International Journal of Obesity (2011) 35, 1470–1478.

The association of body mass index, waist and hip circumference, and waist–hip ratio with Chlamydia pneumoniae IgG antibodies and high-sensitive C-reactive protein at 31 years of age in Northern Finland Birth Cohort 1966.

 

Epidemiology and infection 2010, vol. 138, no9, pp. 1267-1273 ;

Chlamydia pneumoniae infection is associated with elevated body mass index in young men.

 

Life Sciences. Vol 89, Issues 23–24, 5 Dec 2011, Pages 854–861.

A pilot study on the association between double positive Chlamydia pneumoniae serology and serum lipid indices alterations in obese adult females.


 

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Chlamydophila (Chlamydia) pneumoniae in the Alzheimer's brain.

 

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Identification and localization of Chlamydia pneumoniae in the Alzheimer's brain.

 

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Chlamydial LPS and high-sensitivity CRP levels in serum are associated with an elevated body mass index in patients with cardiovascular disease.

 

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The association between past Chlamydia pneumoniae infection and markers of chronic inflammation in obese women.

 

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Adenovirus 36 DNA in adipose tissue of patient with unusual visceral obesity.

 

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Adipogenic cascade can be induced without adipogenic media by a human adenovirus.

 

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Adipogenic human adenovirus-36 reduces leptin expression and secretion and increases glucose uptake by fat cells.

 

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Clinical aspects of Chlamydia pneumoniae infection.

 

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Transmission of Chlamydia pneumoniae.